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lundi 19 mars 2012

Présidentielle 2012: Allègre (ex-PS) met Hollande en caleçon

Claude Allègre: "Je me suis trompé sur Hollande"

Claude Allègre se considère toujours comme "de gauche" mais il a quitté le PS après la désignation de Ségolène Royal comme candidate du parti à l’Elysée. Il pense qu’il n’y a pas "photo" entre Hollande et Sarkozy. Entretien exclusif.


L'ex-ministre de Jospin pense qu’il n’y a pas "photo" entre Hollande et Sarkozy

Compagnon de route de Jospin pendant trente ans, ancien membre du comité directeur et du bureau politique du PS, ex-ministre de l’Education nationale, Claude Allègre se considère toujours comme « de gauche » mais il a quitté le PS après la désignation de Ségolène Royal comme candidate du parti à l’Elysée.

France-Soir. Il circule sur la toile actuellement une vidéo de Jean-Luc Mélenchon datant de 2009 mais faisant état de ce qui se serait passé entre François Hollande, alors Premier secrétaire, et Jean-Luc Mélenchon à l’issue du Congrès socialiste de Brest en 1997. >Mélenchon accuse Hollande de ne pas avoir tenu ses « promesses » et de l’avoir même crédité, au final, d’un score inférieur au score réel de sa motion à Brest. Vous étiez alors membre du PS et très proche de Lionel Jospin. Cet enregistrement vous surprend-il ?

Claude Allègre. Pas du tout ! ... L’une des caractéristiques de François Hollande -homme très intelligent par ailleurs- c’est, en effet, de considérer que >le mensonge est une pratique normale en politique. On le voit dans cette vidéo. Je vous donne un autre exemple, mais il y en a plein.
En 2006, Hollande nous a littéralement baladés, Daniel Vaillant et moi, en venant nous dire formellement, lors d’une conversation discrète à Saint-Germain-des-Prés, qu’il allait faire appel à Jospin pour 2007. Vous connaissez Jospin, quel homme « rigide » il peut être. Il avait été formel : « Compte tenu de ma déclaration de 2002, je n’irai que si on fait appel à moi ». Or jamais Hollande n’est pas allé voir Jospin. Il a, au contraire, lancé Ségolène avec le ferme espoir d’être lui-même en 2007 « le » candidat à l’arrivée. Il a toujours fait comme ça. C’est un manœuvrier. Intelligent et fin, je le répète, mais foncièrement manoeuvrier.

"Il navigue en fonction de la popularité des uns et des autres"

F.-S. >Sur le nucléaire, François Hollande vient de virer de bord en annonçant qu’il n’y aurait, s’il est élu, qu’une seule fermeture de centrale : à Fessenheim. Cela n’a plus rien à voir avec l’accord PS-Verts sur le sujet. Un accord que vous aviez, à l’époque, vivement dénoncé. On imagine donc que vous applaudissez aujourd’hui Hollande ?

C. A. Je n’applaudis pas parce que rien de tout cela ne m’étonne ! C’est exactement la même chose que quand il promet aux enseignants de créer 60.000 nouveaux postes. Demain, il dira : « Si les circonstances le permettent… ». Et après-demain : « On n’est pas en état pour le moment… ». >Aucune promesse venant de lui ne peut être prise au sérieux. D’ailleurs, si les Verts remontaient dans les sondages, il est parfaitement capable de revenir en arrière. Il navigue en fonction de la popularité des uns et des autres, et de cela seul.

"Il s’est mis en travers de la réforme Jospin des retraites"

F.-S. Vous êtes sévère avec un homme qui laisse entendre qu’il a gouverné ou presque entre 1997 et 2002 avec votre grand ami Jospin…

C. A. C’est simplement faux. Comme Premier secrétaire, il a été –c’est normal, et c’est tout autre chose- régulièrement consulté par Jospin Premier ministre (et donc associé à ses choix), comme Mitterrand l’avait fait avec Jospin quand ce dernier était Premier secrétaire. Jospin a-t-il jamais laissé entendre qu’il avait « gouverné avec Mitterrand » ?
Cela dit, François Hollande a eu en deux occasions, c’est vrai, une influence décisive, mais doit-il s’en vanter ? En 2000, c’est lui qui a convaincu un Jospin hésitant de procéder à un remaniement ministériel. Son ambition avouée : devenir ministre de l’Economie et des Finances à la place de Christian Sautter. Il a donc été très déçu que Jospin lui préfère Laurent Fabius.
Mais son intervention vraiment décisive a concerné >le problème de la réforme des retraites.
Jospin voulait absolument engager cette réforme. Il avait pour cela confié un rapport à Jean-Michel Charpin qui était commissaire au Plan. Et il était décidé à mettre la réforme en route. Mais c’était sans compter avec Hollande qui s’est mis en travers, et a fait voter à l’unanimité le bureau du PS en disant : « Non, ce n’est pas le moment, ça va nous faire perdre les élections ». En fait de perdre, Hollande a surtout fait perdre la présidentielle à Jospin car, avec une réforme des retraites engagée, Lionel aura fait valoir sa stature d’homme d’Etat.
Bref, ce que dit aujourd’hui Mélenchon de Hollande, tous les leaders socialistes sans exception –Moscovici, Aubry, Fabius, DSK- l’ont dit et le pensent, même si certains le camouflent pour des raisons d’opportunité. Leur leitmotiv, que je partage : « Il est intelligent, mais c’est un pur manoeuvrier ». Ainsi, depuis très longtemps, mon ami Strauss-Kahn me reproche-t-il vivement de m’être trompé et d’avoir, depuis le début, surestimé Hollande…

"Si Mélenchon était à la place de Hollande, ce serait périlleux pour Sarkozy"

F.-S. Tout le monde sait pourtant que vous avez joué un rôle clé auprès de Jospin pour pousser à la promotion de Hollande, pour accélérer son ascension. Pour faire en sorte >que Jospin lui porte la considération qu’à l’origine il ne lui portait guère. Alors pourquoi êtes-vous aujourd’hui si dur ? Regrettez-vous ce que vous avez fait à l’époque ?

C. A. Que voulez vous ? A tel moment, une personne vous paraît apte à occuper une fonction, et elle se révèle ensuite non appropriée. Rétrospectivement, on peut penser que j’ai commis une erreur. Mais il faut se souvenir des circonstances : à l’époque, tous les ténors du parti entraient au gouvernement, et mon ami Daniel Vaillant -premier choix de Jospin- ne voulait pas de cette responsabilité. Oui, on peut dire que je me suis trompé. Car son bilan à la tête du PS n’a pas été extraordinaire. Certes, il a gagné des élections régionales et municipales, et une élection européenne. Mais il a, bien sûr, essuyé avec le PS deux échecs à la présidentielle en 2002 et en 2007.
Et, quand il est parti, il a laissé le PS avec moitié moins d’adhérents et un état de division que Marine Aubry a justement fustigé. >On ne peut pas prendre le risque de le mettre à la présidence de la République dans la situation très difficile où se trouvent la France et l’Europe.

F.-S. Quel jugement portez-vous jusqu’ici sur la campagne présidentielle ?

C.A. Mélenchon est excellent et, s’il était à la place de Hollande, la situation serait, pour Sarkozy, périlleuse. Sarkozy fait preuve d’une grande compétence. Cela dit, je considère qu’on n’a pas encore abordé les deux sujets cruciaux, et qu’il est temps qu’on y vienne car là est l’essentiel : la crise et l’avenir de l’Europe. On oublie parfois que l’élection du président au suffrage universel, ce n’est pas une compétition de partis, c’est un choix d’hommes : >qui est le plus compétent, le plus capable de mener la France ? La comparaison est entre deux hommes. Il s’agira donc de choisir entre Hollande et Sarkozy, pas entre l’UMP et le PS.


Propos recueillis par Dominique de Montvalon

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