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dimanche 19 juillet 2015

Le gouvernement lance une évaluation de contrôle du temps de travail des fonctionnaires

L'Etat-patron socialiste traque ses employés 

Mauvaise signal pour la CFDT qui va devoir bouger

Mardi 16 juin 2015, la ministre de la Fonction publique, Marylise Lebranchu, a engagé son processus gagnant-perdant, présentant aux syndicats, dans un premier temps, des propositions pour augmenter la paie de près de 5 millions d’agents titulaires, du haut cadre d’administration centrale au cantonnier employé par une petite commune. Mais ce sera donnant donnant.
En mai 2014, les collectivités territoriales avaient encore recruté 31.000 fonctionnaires de plus.Sur les 6 premiers mois de l'année 2013, l'Etat lui-même avait embauché davantage de nouveaux agents que sur l'ensemble de l'année 2012: le plus gros employeur de France a procédé par concours au recrutement de 28.228 personnes. Au total, 36.575 nouveaux agents ont intégré au 1er semestre 2013, les effectifs des différents ministères ayant exprimé des besoins. En 2012, les recrutements s'étaient limités à 34.054 sur l'ensemble de l'année.
Le 1er septembre 2014, le président de la République avait lancé aux fonctionnaires un appel à s’engager pour rendre l’action publique plus "efficace"et plus "rapide".
La Fonction publique d’Etat recrute encore en 2015-2016. Plus de 2,3 millions de personnes y travaillent déjà, dont un tiers dans les ministères et deux tiers répartis sur l’ensemble du territoire et parfois à l’étranger. Selon l'édition 2014 du "rapport annuel sur l'état de la fonction publique", le nombre de fonctionnaires atteignait près de 5,4 millions d'agents.

Le gouvernement  risque pourtant de s'aliéner son fonds électoral. 
Manuel Valls n'assume encore pas la responsabilité du piège qu'il tend aux fonctionnaires.  Vendredi 17 juillet, il a annoncé le lancement d’une "mission d’évaluation sur le temps de travail" des agents employés par l’Etat, les collectivités locales et les établissements hospitaliers. Cette mission a été confiée à Philippe Laurent (ci-contre), maire centriste, sans étiquette, de Sceaux (Hauts-de-Seine), président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT). Président de la Commission des Finances de l'Association des maires de France, il se veut défenseur du rôle des collectivités locales. Or, si cet audit vise à avoir "une vue d’ensemble" du sujet, selon le communiqué diffusé par le cabinet de la ministre de la Fonction publique, il se prépare à assumer le coup tordu qu'il a accepté de Marylise Lebranchu.  C’est cette intime de la maire de Lille, Martine Aubry, qui avait proposé qu’une telle réflexion soit engagée. Le sujet retenu, ultra-sensible politiquement, et le moment choisi pour dévoiler à la presse l’existence de cette mission – un vendredi vers 18 h 30 à la mi-juillet – ont de quoi intriguer.

Les agents publics doivent-ils se préparer à un "big bang " dans leurs horaires ? 
La lettre que le premier ministre a adressée à Ph. Laurent pour dessiner les contours de sa tâche le nie. Qui croira que l'objectif est de réaliser un simple "état des lieux" et que le besoin d'une évaluation du temps de travail des fonctionnaires s'est soudainement fait ressentir alors qu'il n’a été jugé indispensable depuis le rapport de Jacques Roché, en janvier 1999 ? 
Cette urgence ne s'était pas imposée à Martine Aubry lorsqu'elle imposa ses lois Aubry sur les 35 heures qui ont pourtant profondément déstabilisé l'économie française en "conduisant à une grande diversité d’application parmi les employeurs publics", de l'aveu de M. Valls dans son courrier. Quinze ans après la mise en place de cette réforme par le gouvernement Jospin à partir de l’année 2000 par deux lois votées en 1998 et 2000, il est temps de "tirer un bilan", estime Manuel Valls.

Recommandations possibles

Le chef du gouvernement demande à Ph. Laurent d’examiner (ou remettre en cause) la façon dont la réduction du temps de travail a été instaurée, "ainsi que les différents cycles de travail retenus". Valls "souhaite également disposer d’un éclairage particulier sur les agents dits “au forfait” dont le temps de travail ne fait l’objet d’aucun décompte". Une allusion aux cadres, souvent soumis à des emplois du temps supérieurs à 48 heures par semaine – un seuil à ne pas dépasser en principe, sauf si des dérogations ont été prévues. 

S’il le juge nécessaire, Ph. Laurent pourra formuler les recommandations que Hollande et Valls souhaitent entendre sur "des évolutions des réglementations". Laurent a reçu une consigne importante : il n’est pas question de remettre en cause "le principe d’un temps de travail annuel de 1.607 heures", insiste Valls dans la lettre de mission. Le rapport du président du CSFPT devra être remis "le 1er février 2016 au plus tard".

Cette décision ne constitue pas vraiment une surprise pour les organisations de fonctionnaires. M. Lebranchu avait exprimé le désir, au début du printemps, d’avoir les éléments sur le sujet de réflexion que Martine Aubry avait négligés, lors d’une réunion du Conseil commun de la fonction publique, explique une syndicaliste : "L’un de ses arguments consistait à dire qu’elle voulait tordre le cou aux discours selon lesquels les agents ne foutent rien", ajoute-t-elle. "La ministre en avait parlé lors de réunions bilatérales avec les syndicats", renchérit "une source au sein de l’exécutif". Mais Valls n'est pas Ayrault.

Cerner les "dérives" et ficher les fainéants

Le fait d’avoir attribué la mission d’évaluation à Laurent "n’est pas une mauvaise chose", se félicite cette même syndicaliste anonyme, mais proche du gouvernement... En tant qu’élu local et président du CSFPT, il connaît très bien cette problématique et s’est souvent distingué par des prises de position en faveur des fonctionnaires, notamment en critiquant le maintien du gel du point d’indice. "Ce n’est pas un hasard si cette personnalité a été choisie", confirme "une source au sein de l’exécutif". Compte tenu de l’opinion favorable dont il bénéficie au CSFPT parmi les syndicats et les représentants d’employeurs publics, toutes obédiences confondues, Laurent devrait pouvoir mener son audit sans décevoir le pouvoir socialiste. Au passage, l'opposition de droite pourra difficilement accuser le gouvernement de procéder à une évaluation orientée ou partiale - quelle idée ! -puisqu’elle est réalisée par un alibi centriste tardif de l'UDI (depuis 2012), pour pouvoir se faire réélire à Sceaux, avec le soutien de l'UMP.

"Une source proche du dossier", si mystérieuse soit-elle, assure opportunément que les syndicats ont conscience de la nécessité de dresser un état des lieux. A la fois pour contrer les préjugés, qui s’affirment avec de plus en plus de force, et pour cerner les "dérives"qui peuvent exister, ici et là, dans les trois versants de la fonction publique (Etat, collectivités locales, établissements de santé ou médico-sociaux). Laurent aura à sa disposition l’inspection générale des Finances, l’inspection générale des Affaires sociales (connue pour son ardeur au travail), l’inspection générale de l’administration et l’inspection générale de l’Insee. Une masse inerte de matière grise qui ne sera pas inutile, si elle est parvient à se mettre en branle, tant sa mission s’annonce colossale.

Au final, les fonctionnaires pourraient être tentés de faire des heures dans la rue.

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