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dimanche 1 août 2010

Alain Minc décrypte Edwy Plenel de Mediapart

Les exploits médiatiques d'un trotskiste

L'affaire Bettencourt trouve son origine dans les « révélations » du site Internet payant Mediapart, contestées, voire démenties par l'ex-comptable licenciée par Liliane Bettencourt, l'héritière de L'Oréal, par ailleurs mise en cause par sa propre fille. Si troubles soient les sources du trotskiste Edwy Plenel qui dirige le site, le PS avec Arnaud Montebourg et Europe Ecologie avec Eva Joly ont politisé les accusations sans preuves en impliquant le couple Woerth - sur des "probabilités" - et la presse a gonflé l'opération de déstabilisation du pouvoir par l'opposition.
Lire PaSiDupes: Mediapart a-t-il acheté les "révélations" de l'ex-comptable ?

L’essayiste, économiste et écrivain Alain Minc présenté comme l’un des conseillers influents de Nicolas Sarkozy a accordé un entretien à France Soir, publié le 19/07/10:

France-Soir. La prestation du chef de l’Etat lundi dernier sur France 2 vous a-t-elle surpris ?
Alain Minc
. Surpris, non, mais je suis de parti pris (sourire)… Cette intervention m’en a rappelé une autre : lorsque Nicolas Sarkozy, en 2007, entre les deux tours de la présidentielle, a affronté Ségolène Royal. Dans les deux cas, il y avait la maîtrise de soi, le calme, la présidentialisation. Une prestation réussie. Politiquement, une page, grâce à cela, est, je l’espère, tournée. Les problèmes de la France – les vrais – sont devant nous.

F.-S. Comment analysez-vous rôle qu’a joué dans l’affaire Bettencourt (et que joue encore) Mediapart, le site que dirige sur le Net Edwy Plenel, l’ancien directeur du Monde ? Plenel, vous le connaissez…
A. M.
Si je le connais ! Je dois être une des meilleurs connaisseurs français du « plénélisme » car j’ai cohabité avec lui pendant des années quand j’étais au conseil de surveillance du Monde. Eh bien Plenel a fait du Plenel. Lire PaSiDupes: Mediapart, le pire du Net (à part LePost ...)
Dois-je vous rappeler
- le titre sur six colonnes à la Une fait par Plenel dans le dos de Jean-Marie Colombani et qui a conduit Strauss-Kahn à l’époque à la démission (avant, chacun s’en souvient, un non-lieu) - lire PaSiDupes à la date du 24 mai 2006 ?
-Dois-je vous rappeler la façon dont Le Monde a traité la fameuse « cassette Méry » (lire PaSiDupes), avec un Plenel qui cherchait à aller plus loin que ce que disait la cassette pour mettre en cause Jacques Chirac ?
- Et je ne parle pas de laffaire Baudis (lire PaSiDupes) !
Encore à l’époque Plenel vivait-il dans un univers où, en la personne de son patron, Colombani, il y avait des contre-pouvoirs.

Désormais, nous connaissons Plenel en liberté.
Et Plenel en liberté, c’est quelqu’un chez qui la bonne conscience d’incarner le bien se mêle, de manière très compliquée, à beaucoup d’arrière-pensées. Plenel est un grand type de « coups » journalistiques, même s’il est étrange, quand il fait parler la comptable de Liliane Bettencourt, qu’il n’y ait ni script ni enregistrements. S’il avait pu mettre le pouvoir KO, il ne se serait pas gêné. Chez Plenel, il y a beaucoup de talent, beaucoup d’arrière-pensées et toujours trois pas de trop.

« Il faut rendre hommage au sang-froid des syndicats »

F.-S. Edwy Plenel, c’est un fait, aura donné le « la »…
A. M.
Je suis très fasciné, en ce moment, par les phénomènes grégaires. Et je vais vous en citer trois :
- les banquiers qui s’affolaient en septembre 2008 ;
- les rédacteurs du Monde qui, il y a un mois, choisissent leurs patrons en votant à 90 % pour eux ;
-enfin, la classe politique, lors des révélations de Médiapart, qui, aussitôt, croit à la crise de régime. Dans nos sociétés, la peur fabrique des phénomènes d’une violence que nous n’avions jamais connue jusqu’ici.

[Et Alain Minc ne cite pas toutes les tentatives récentes de détournement politicien de phénomènes internationaux:
- la psychose de la grippe H1N1 venue du Mexique (lire PaSiDupes), ainsi que la rumeur de démission de Roselyne Bachelot;
- le nuage volcanique islandais et le principe de précaution jugé excessif. Pourtant 72% des Français approuvaient la fermeture d'aéroports: lire PaSiDupes;
- ou la "tentative de déstabilisation" (Valérie Pécresse) dans les rumeurs d'implication des époux Woerth: reprise de la technique du ricochet.

Quant aux rumeurs, nous les mentionnons pour mémoire de l'agitation médiatique de l'opinion, au nom du "droit à la désinformation l'information":
- les rumeurs sur la nomination d'Alexandre Bompard, patron d'Europe 1, à la tête de France Télévisions;
- la rumeur (France 24, service public "impertinent" et condamné à une amende) qui prêta à Benjamin Biolay une relation avec Carla Bruni-Sarkozy, ainsi que la mise en cause de Rachida Dati: d'une pierre deux coups, comme dans la rumeur d'infidélité de la Première dame;
- sans insister sur les odieux Stéphane Guillon ou Didier Porte, qui se rêvent en humoristes, et du torchon satirique Le Monte qui dégrade la parodie au rang du scabreux : tous revendiquent le "droit à l'expression", si
abjecte soit elle.]

F.-S. Une thèse répandue à droite, c’est que, derrière l’affaire Bettencourt, c’est, en fait, la réforme des retraites qui est visée…
A. M.
Je n’y crois pas. Au fond, ce qui vient d’arriver à Nicolas Sarkozy, c’est comme ce qui arrive à un viticulteur qui a préparé ses vendanges avec le plus extrême soin et, boum ! surgit l’orage. Et voilà le vignoble grêlé. Car s’il y a eu une réforme qui a fait l’objet d’un processus de prudence, de technicité, de professionnalisme hors pair, c’est bien celle-là. Je crois d’autant moins à la théorie du complot que les syndicats, une fois de plus, ont fait preuve d’un sens impressionnant de leurs responsabilités. Aucun syndicaliste n’a essayé d’utiliser l’affaire Bettencourt pour peser dans son face-à-face avec le pouvoir. Depuis 2007, il faut chaque jour rendre hommage au sang-froid des syndicats. [La répartition des tâches est en effet troublante: une sorte de délégation de pouvoirs...] Je mets au crédit de Nicolas Sarkozy d’avoir créé avec eux un type de relations qui n’existait pas jusque-là.

F.-S. La réforme des retraites sera donc votée ?
A. M.
Le pays est mûr pour la réforme des retraites comme il est mûr pour une politique « rigoureuse », selon le mot que préfère le Président. La réforme des retraites est vécue pour ce qu’elle est : un point d’équilibre entre ce que le monde extérieur attend de nous et ce que la société française peut supporter. Quant à la politique rigoureuse, il faut comprendre qu’on a changé, là aussi, d’époque. Avant, c’était un coup d’accélérateur, un coup de frein, et ainsi de suite. Aujourd’hui, il faut à la fois un coup d’accélérateur (pour ne pas casser une relance qui va partout cahin-caha) et un coup de frein (pour confirmer aux marchés que la dette ne s’emballera pas). C’est un pilotage économique sans précédent, subtilement conduit. Il y a en marre de l’autoflagellation des Européens : ils peuvent être fiers de ce qu’ils ont fait et font ensemble.

« Les Bettencourt, c’est un univers erratique »

F.-S. Eric Woerth est au cœur des polémiques et au centre de toutes les attaques…
A. M.
J’ai de l’estime pour lui. C’est un des ministres les plus professionnels qui soient. Quant à son épouse Florence, il faut se rendre compte qu’entre son entrée chez les Bettencourt en 2007 et la situation de 2010 avec ce que nous découvrons, tout a changé. En 2007, les Bettencourt, c’est le temple du capitalisme familial et responsable. En 2010, c’est un univers erratique.

F.-S. A la télévision, Nicolas Sarkozy a longuement parlé de l’argent…
A. M.
Les gens se trompent sur Sarkozy. Il n’est pas fasciné par l’argent : il est intéressé par les entrepreneurs. Par l’espèce de force vitale qu’il y a chez les grands entrepreneurs. Cela l’intéresse parce qu’il leur ressemble. On croit que, chez lui, c’est la fascination de l’argent de ces gens-là alors que c’est la fascination de leur capacité de faire. Pour le reste, Nicolas Sarkozy est quelqu’un qui a toujours été très prudent avec l’argent, y compris dans l’exercice de son métier d’avocat. Vous savez : quelqu’un qui a été chassé comme on chasse à courre, au sens où la meute chiraquienne était à ses trousses, ne peut qu’avoir eu – et qu’avoir – tous les réflexes de prudence qu’il faut. S’il y a un type qui, depuis 1995, ne pouvait pas avoir le moindre sentiment d’impunité, c’est bien Nicolas Sarkozy !
Lire PaSiDupes sur la déclaration présidentielle

F.-S. Lorsque la réforme des retraites sera votée, s’ouvrira, a dit le chef de l’Etat, une nouvelle séquence, la dernière du quinquennat…
A. M.
Cette période va être dominée par la présidence française du G20. Ce n’est pas un cadeau. Ce n’est pas gagné. Il va prendre, dans cette affaire, de vrais risques. Si on n’est pas dans un climat de crise, les conflits potentiels dans cet aréopage sont multiples et légitimes.

F.-S. Y a-t-il en Europe, France compris, un danger populiste ?
A. M.
Il y a une poussée populiste. Voyez le vote en Flandre, ou pour la Ligue du Nord en Italie car, à côté, le Front national apparaîtrait presque modéré. Mais je retire de cette crise que nos sociétés sont solides et nos économies fragiles alors que, très longtemps, on nous a soutenu l’inverse. Voyez, globalement, avec quel calme et quelle maturité les Français traversent la crise que nous vivons !

« Le système a failli mourir. Nous sommes des survivants »

F.-S. Quand verra-t-on la fin de cette crise ?
A. M.
Il faut d’abord se rappeler que le système économique a failli mourir et que nous sommes des survivants. Oui, on a failli avoir, à un moment donné, un dérapage plus grave encore que la crise des années 1930. Du coup, le problème politique est simple à énoncer, mais pas à résoudre : on va mettre des années à payer le prix de notre sauvetage mais plus on s’éloigne du moment où on a failli sauter, moins les gens s’en souviennent. Il faut un effort collectif pour rembourser les 25 % d’endettement supplémentaire qui nous ont permis d’éviter le pire. Mais, évidemment, ces 25 % s’additionnent avec l’endettement qui prévalait avant et qui est le fruit de trente ans de lâchetés collectives.

F.-S. Quel jugement portez-vous sur la gauche, où vous comptez encore beaucoup d’amis ?
A. M.
J’aurais aimé que la gauche politique se montre aussi responsable que les syndicats.

F.-S. Vous avez souhaité que, pour la dernière ligne droite du quinquennat, François Fillon soit remplacé…
A. M.
J’ai dit, en effet, que Giscard avait été battu en 1981 car il avait gardé à Matignon Raymond Barre. Cela dit, le Premier ministre a fait preuve ces derniers temps d’une résilience et d’une solidarité sans faille. Du coup, Sarkozy a deux schémas possibles : il remplace Fillon, et il peut garder beaucoup de ministres importants et de qualité ; il garde Fillon, et il doit changer beaucoup de ministres.


F.-S. Et le résultat de la présidentielle 2012 ?
A. M.
… Cela se jouera en France comme dans toutes les démocraties occidentales : dans le dernier mois. Et ce sera du 50-50.
Propos recueillis par Dominique de Montvalon

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